Journal des Infirmiers

La sophrologie, quelle place dans l’exercice du métier d’infirmier(e)sophrologie

Après avoir présenté succinctement et contextualisé l’apparition de la sophrologie, je vous propose de vous montrer comment cette méthode psychocorporelle peut s’intégrer dans votre pratique professionnelle de la façon la plus simple possible.

Contexte d’émergence et projet de la sophrologie

La sophrologie est une méthode rationnelle mise au point au tout début des années soixante.
C’est une méthode psychocorporelle de rééducation de la sensorialité qui permet également de développer plus d’habileté à utiliser sa propre conscience et toutes les ressources qu’elle contient.
La sophrologie vise également à réharmoniser la conscience et permettre ainsi aux personnes de retrouver l’unité du corps et de l’esprit.
Sa dimension plus thérapeutique est cette partie de ré harmonisation de la conscience notamment par la neutralisation de ses éléments négatifs (émotions négatives, traumas, phobie…)

Le créateur de la sophrologie, Alfonso Caycedo (1932-2017) était un neuropsychiatre qui se refusait à utiliser les méthodes terriblement coercitives alors en vigueur (électrochocs, comas insuliniques…) pour soigner les patients atteints de troubles mentaux.
Nous sommes alors au cœur des trente glorieuses, période où les progrès techniques sont très importants et l’industrialisation galopante de divers domaines de la vie des Hommes ont créé une accélération exponentielle du rythme de vie.
Se pose alors ainsi, la question de l’adaptation de l’Homme à ce rythme et plus précisément le maintien de son équilibre et de sa santé dans un monde qui va de plus en plus vite.

Il y a donc d’une part beaucoup plus d’informations à gérer et d’autre part un stress nouveau généré par une accélération trop importante par rapport aux capacités d’adaptations naturelles des individus.
La sophrologie est aujourd’hui plurielle, tout comme d’autres champs disciplinaires, il existe plusieurs écoles, correspondant à différentes sensibilités, différentes manières de concevoir et de pratiquer la sophrologie.

Quel peut être l’apport de la sophrologie dans le cadre de l’exercice du métier d’infirmier(e) ?

Définissons tout d’abord les caractéristiques du métier d’infirmier(e), ce qui nous permettra dans un second temps de définir précisément comment la sophrologie peut s’intégrer dans cette pratique :
L’infirmier(e) dispense des soins de nature préventive, curative ou palliative pour promouvoir, maintenir et restaurer la santé des patients.
Ce métier à hautes responsabilités exige rigueur, vigilance et technicité.
Un(e) infirmier(e) a donc d’importantes responsabilités.
Il doit pouvoir bien saisir les besoins particuliers des patients qu’ils ont en charge.
La clarté d’esprit et une bonne réception des informations verbales et non-verbales sont donc capitales.
La charge temporelle peut être très importante et même dépasser très largement les capacités physiques et psychologiques des soignants selon les services et/ou les conditions dans lesquelles ils exercent.
La charge émotionnelle peut être aussi très importante et impactante sur l’équilibre émotionnel des infirmier(e)s.

Nous pouvons à présent préciser de façon plus pertinente et ciblée comment la sophrologie peut s’intégrer dans le cadre de l’exercice de cette noble profession médicale.
La sophrologie est une pratique vivante, elle se vit au quotidien.
En effet, afin de mettre en place de nouvelles habitudes physiologiques et psychologiques qui entraîneront à leur tour de nouvelles habitudes émotionnelles plus favorables, cela requière un certain entraînement, une certaine régularité.

La respiration

La sophrologie dans son aspect pédagogique permet de rééduquer la respiration par un réapprentissage d’une respiration correcte.
Cela peut se faire seul chez soi, le plus régulièrement possible comme déjà précisé.
La respiration est une fonction vitale dont l’importance est totalement sous-estimée.
Cette pratique est pleine de bienfaits tout autant qu’elle est simple à mettre en place.
Il est facile d’arriver à s’accorder au moins deux fois cinq minutes dans une journée.
Une bonne respiration, complète à certains moments de la journée, c’est à dire en amenant l’air inspiré au niveau du ventre puis des flancs et enfin dans la zone sous-claviculaire, va permettre à minima que les processus physiologiques de base se fassent correctement.
Ne pas respirer correctement entraîne de-facto un dysfonctionnement de l’organisme et un certain niveau d’anxiété que l’on aura tendance à justifier par les conditions externes.

Dans le cadre direct de la profession d’infirmier(e), une autre pratique respiratoire peut consister à faire des pauses respiratoires pas forcément en s’arrêtant entre deux patients.
Il peut simplement s’agir de la reprise de la conscience de sa respiration et des sensations respiratoires puis dans un second temps en quelques respirations un peu plus profondes.
Ces -retours à soi- vont permettre une meilleure oxygénation et aussi et surtout un recentrage.
Les répétitions vont susciter le désir de retrouver ce bien-être d’autant plus que cela est très facile à mettre en place car peu contraignant.
On peut également, après les soins d’un patient, s’asseoir, s’intérioriser en fermant les yeux quelques instants (quelques minutes suffisent) et faire un petit bilan interne de ses émotions, et de l’état physiologique du corps (niveau de fatigue, niveau de stress…)

Ces outils simples vont assurément participer à faire baisser le niveau de stress et à conserver un certain bien être au quotidien.

La gestion du stress

Dans notre quotidien, nous sommes tous soumis à différents stress : physique, émotionnel, environnemental.
Dans les métiers de soins comme le métier d’infirmier(e), le niveau de stress peut être extrêmement élevé.
La sophrologie peut s’avérer un précieux allié concernant la gestion du stress, c’est même une de ses principales indications.
Les-retours à soi, que nous avons précédemment évoqués par la conscience respiratoire, vont participer à garder un certain niveau de sérénité.
Il peut survenir des temps plus aigus de montée du niveau de stress et/ou d’accumulation de stress.
Dans ces cas-là, on pourra à posteriori, évacuer au moyen de certaines méthodes comme la méthode de Jacobson, le stress accumulé.
C’est une méthode de relaxation différentielle basée sur des mouvements contractions-relâchement de différents groupes musculaires.
Cette méthode est simple à pratiquer et s’avère très efficace pour faire littéralement sortir le stress du corps.
Elle permet que dans un second temps l’organisme rentre entre récupération-régénération, les tensions perturbatrices ayant été évacuées.

Le stress, s’il n’est pas évacué perturbe le fonctionnement normal du corps.
Il est donc très important d’évacuer les tensions qui sont dans le corps.
A défaut de cela, au fur et à mesure, le corps ne pourra correctement fonctionner et ce sera la sphère émotionnelle et la sphère mentale qui seront affectées également.
La pratique du sport permet certes d’évacuer un certain stress, mais pas de façon aussi importante. Le sport crée par ailleurs un stress supplémentaire et il s’avère parfois -une fausse bonne idée- de vouloir pratiquer une activité sportive de façon intense alors que le corps est déjà très fatigué.

Les techniques de visualisation, autre pratique que propose la sophrologie vont permettre par exemple, des anticipations favorables de situations habituellement compliquées et /ou stressantes outre mesure.

La gestion des émotions

Nous sommes des êtres de relation et les émotions sont nos balises.
Elles sont en lien direct avec notre corps et nous indiquent où nous en sommes par rapport à une situation donnée à un instant -t-.
Elles ont par ailleurs leur propre chimie.
Il existe en effet une physiologie des émotions et donc corrélativement, une gestion nécessaire des émotions.
Afin de les identifier, de les discriminer suffisamment, on doit être à un certain degré d’écoute de soi et de ce qui se passe à l’intérieur de soi.
Bien évidemment, nous ne sommes pas forcés d’être à l’écoute de nous-même.
Simplement, nous devons savoir, que tout comme pour le stress, si les émotions sont négligées, car non conscientisées et non acceptées, elles se logeront dans le corps et y créeront des déséquilibres plus ou moins importants selon leur intensité et perturberont là aussi les autres sphères de notre existence. Cela pourra affecter jusqu’à notre vision du monde.
A plus forte raison lorsque l’on exerce un métier de soins, qui est un métier de relation, il est important d’être conscient de ce que l’on ressent à l’intérieur de soi.
De plus, parfois le contact avec certains patients génère en nous l’émergence d’émotions perturbatrices car cela nous renvoie par exemple à notre propre histoire.
Afin de ne pas être affecté outre mesure, pouvoir en prendre conscience peut être salvateur et permettre de prendre de la distance, une juste distance pour pouvoir exercer correctement son métier.
Cela peut aussi concerner des émotions trop intenses qui nous montrent que peut-être notre engagement avec tel ou tel patient est trop important et que nous sommes en déséquilibre.
La conscience de nos propres émotions participe à la connaissance de soi
et tout comme nous faisons des mises à jour sur notre ordinateur pour qu’il fonctionne correctement, ces mises à jour émotionnelles sont nécessaires.
L’intériorisation qui se produit lorsque l’on ferme les yeux en séance de sophrologie nous permet notamment de réapprendre à écouter ce qui se passe à l’intérieur de soi, a réécouter les messages que notre corps et notre conscience nous envoient en permanence.

Le système nerveux, notre plus grand allié

Il est essentiel pour exercer dans de bonnes conditions le métier d’infirmier(e) de disposer d’une certaine acuité afin de prendre de bonnes décisions à plus forte raison dans certaines situations d’urgence.
Pour cela, l’état nerveux général doit être le plus opérationnel possible.
Savoir comment fonctionne notre système nerveux va permettre de mieux composer avec lui et même d’en faire tout comme notre corps un précieux allié.
Être plus conscient de soi va permettre de pouvoir mieux évaluer en temps réel son état interne et ses besoins et aussi permettre de répondre de façon plus adéquate aux sollicitations de son environnement.
Grâce à la pratique de la sophrologie, en pratiquant certains exercices, on va pouvoir moduler l’activité du système nerveux, le rééquilibrer et notamment activer le système nerveux parasympathique.
Cette branche du système nerveux autonome est chargée de réparer, de régénérer l’organisme. Elle est sous la régence de certaines hormones dont la DHEA et l’Acétylcholine.
La production de ces hormones ainsi que le relâchement du corps vont également générer des sensation positives, un vécu positif de son corps.
Ces temps de récupération sont essentiels à bien des égards.
Négliger ces temps de récupération va tôt ou tard se répercuter sur une ou plusieurs sphères de notre existence : physique, relationnelle, professionnelle.
La qualité de la vie sera également affectée, le vécu du quotidien sera moins positif, plus laborieux. Cela n’a par ailleurs aucune vertu d’avoir l’impression de vivre en se forçant en permanence, on n’est pas plus efficace.

Dans la pratique du métier d’infirmier(e), la pratique de la sophrologie et d’outils sophrologiques vont permettre plus d’efficacité et aussi plus de confort à exercer sa profession.
Le stress, tout comme les émotions inconfortables pourront être mieux gérés au quotidien. Le corps pourra ainsi exercer son rôle d’allié si précieux.
Un suivi particulier pourra s’avérer très positif et rééquilibrant dans les moments plus sensibles, comme les moments de transition.
Comme toute pratique, elle nécessite un entraînement régulier si l’on souhaite l’installation dans la durée de nouvelles habitudes plus favorables.

Lynda Roure, Sophrologue à Gréoux-les Bains
Ecole de sophrologie de Salon de Provence

www.ecole-sophrologie.com

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